Textes sur la Loire

  • Louis Pavie appréciait les rives sablonneuses de Sainte-Gemmes, où sa belle-mère (Fabre) demeurait encore. Une maison est aujourd’hui érigée sur l’emplacement qu’elle occupait autrefois. Un écrit la situe à l’angle de la rue de l’église et de la rue des moulins, proche du moulin cavier que l’on peut encore apercevoir dans le bourg de Sainte-Gemmes. Le cadastre fait également mention d’une parcelle située chemin de Bel Oeil (petite rue à gauche en remontant vers Angers, avant le Hutreau) ayant appartenu à Louis Pavie.
  • Des nombreuses expériences que l’enfance procure, il en est qui allument au cœur des feux qui brûlent jusqu’à la mort. Victor et Théodore ont été élevés au contact de la nature, celle-ci est toujours pour eux une source d’émerveillement, de connaissances et de joie. Il faut dire que les deux frères passent le plus clair de leurs loisirs à courir les bois et les prés des bords de Loire et de la Mayenne.

À Sainte-Gemmes-sur-Loire, les jeunes garçons emplissent leurs yeux du panorama magnifique du grand fleuve sauvage, qui étire l’été ses « grèves dorées », et roule l’hiver ses flots démesurés. Théodore rapporte l’effet que produit sur eux ce vaste spectacle :

Tout resplendissait alors à notre vue charmée et nous courions […] les yeux fixés dans le lointain sur les arches des Ponts-de-Cé […] Tout était chaud, la terre, les eaux, le ciel rayé de petits nuages qui se fondaient à l’horizon […] Quand l’hiver venait, quand de grosses nuées chargées de pluie et poussées par le vent de la mer creusaient des vagues profondes dans les vagues débordées et couverte d’une écume jaune, les grands bateaux remontaient vers Tours et Orléans.[1] 

Théodore évoquera plus tard ces paysages, la vie maritime et les dangers du progrès dans une nouvelle, La Fauvette bleue, récit des bords de Loire, parue dans la Revue des Deux Mondes en 1861. Cette histoire nous avait été racontée lors de la célébration du bicentenaire de la naissance de Théodore Pavie à Angers en 2011, lue à deux voix par M. Olivier de Stoppani et Mme Pascale Voisin, et agrémentée de quelques prises de vues réalisées au  printemps de la même année par M. de Stoppani, sur les lieux même du récit de Théodore Pavie : l’île de Béhuard.

Ces immensités imprimèrent dans l’esprit de Victor et Théodore le goût des grands espaces, des émotions romantiques, des tableaux tourmentés. D’autres souvenirs remontent à la mémoire de Théodore :

Autant les rives de la Loire nous offraient d’ampleur dans l’ensemble solennel de leurs aspects changeants, autant le pays de Feneu empruntait de gaieté au voisinage de la Mayenne. En dépit des hauts rochers qui bordent sa rive gauche en face du village de Juigné et sur lesquels Victor cueillit pour la première fois d’une main tremblante de joie la Doronicum pardalianches. [2]

  • Pour nombre d’auteurs romantiques, la nature est une muse prolifique. Lamartine comme Hugo chantent les sensations qui jaillissent de leur cœur au contact des montagnes, des forêts, des lacs. Comme eux, les Pavie vibrent à l’unisson pour la Nature. Mais outre les rivières, les plantes, les champs et les arbres, les frères Pavie éprouvent également durant leur enfance une grande passion pour les animaux. Théodore raconte :

Les petits taillis mystérieux, peuplés de merles, de grives, de rossignols et de fauvettes, les vieux chênes de haute futaie où nichaient les oiseaux de haut vol, éperviers, ramiers et corneilles, les vieilles souches éventrées, où s’abritait le hibou, offraient un charme extraordinaire à nos promenades.[3] 

 L’intérêt de Victor se porte notamment sur les grenouilles :

Il restait en contemplation devant ces batraciens amphibies […] Oh ! que d’heures il passa près des mares de Feneu à pêcher des grenouilles, à les rejeter en arrière par-dessus sa tête et à les voir, par des sauts de clown, regagner les eaux où elles se replongeaient.[4] 

Épris de cette vie campagnarde, ils furent, plus tard, les auteurs de nombreux textes sur la région, sa flore, ses paysages, et pour Victor, aussi, de poèmes entièrement dédiés à la vie végétale.

  • Comme tous leurs contemporains, les jeunes Pavie marchent beaucoup. Et en ce qui concerne les autres activités physiques qu’ils pratiquent, les opportunités ne manquent pas :

Les deux frères avaient leur canot que Théodore, marin dans l’âme, conduisait à la voile ou à la rame, sur la Maine ou la Loire. Ils prenaient aussi des leçons d’équitation avec leur ami de Nerbonne, et chassaient pendant les vacances.[5] 

Au début du dix-neuvième siècle, le cheval est partout ; il fait partie du quotidien et reste le meilleur compagnon de l’homme. C’est pourquoi Victor y attache un intérêt particulier. Bon cavalier, il est aussi friand des spectacles équestres que proposent les troupes comme celle du célèbre Francini, qui, à intervalles réguliers, s’installe cour de l’Académie à Angers. Les manèges équestres se multiplient à partir des années 1820. L’une de ces troupes, dirigée par un certain Mahier, de Strasbourg, faisait d’ailleurs imprimer ses affiches et tracts chez Louis Pavie,

Victor raconte une anecdote :

La duchesse de Berry, de passage dans notre cité, en repartait le lendemain pour Nantes, escortée d’une garde d’honneur […] L’idée vint à Mahier, homme de manifestation s’il en fut, de convoquer sa troupe en grande tenue, frac noir, gants jaunes et pantalon blanc, de se mettre à sa tête et de la diriger sur Saint-Georges […] Or, quand nous arrivâmes, […] plus d’Altesse, ni personne de sa suite. [6]


[1] Pavie Victor, Oeuvres choisies, t. II, p 34.

[2] Ibid. p 35.

[3] Id.

[4] Ibid., p 36

[5] Id.

[6] Ibid., p 50-51.